LA MOBILISATION DANS LA GRANDE DISTRIBUTION NE LAISSE PERSONNE INDIFFERENT

Publié le par Liberté 62

DANS UN MONDE, OÙ LE “TOUT/TOUT DE SUITE” DEVIENT INSUPPORTABLE


La mobilisation dans la grande distribution ne laisse personne indifférent


Par Pierre Pirierros

Dans ce monde, où l'on veut tout, tout de suite, service et accueil compris en trois minutes chronos, nous avons des revendications à défendre quant à notre avenir et la perception de notre rôle tant du point de vue de la direction que de la clientèle. Les passages en caisse dépendent de plusieurs choses mais le stress imposé par la direction ne se calcule pas dans l’horaire de travail”, Sylviane D. “hôtesse de caisse” au supermarché Carrefour de Berck était dans l’action, samedi dernier, à la veille d’un week-end qui n’en était pas un pour elle puisque le lundi de pâques était travaillé sur un “volontariat bizarroïde”.


LES 35 heures, la flexibilité, les amplitudes des longues journées de travail ont modifié le travail “habituel” des caissières. “Or, notre journée, dit-elle, est bousculée d’une semaine à une autre, pour un salaire qui ne dépasse pas les 1.050 euros, avec deux enfants en bas âge, vous faites vite le compte ; les relations lors des passages en caisse dépendent de tas d’aléas, l’humeur des clients nous la subissons à divers moments, c’est plus facile le matin qu’en fin de journée. Par contre, le samedi est un jour très difficile, car c’est la plus grosse journée de la semaine et des familles entières font leur course dans un brouhaha décousu et un mélange de mauvaise musique et d’odeurs diverses. Notre direction veut du chiffre.”


Pétition


Faire signer une pétition était possible à l’extérieur du magasin, par la CGT et la CFDT mais ce n’était pas le “moyen” le plus adapté pour faire comprendre à tout le monde l’ampleur des difficultés et des “servitudes” des employés de la grande distribution. Dans quelque temps, le code du travail va changer bien des aspects, ainsi le “licenciement économique” se retrouve dans la partie consacrée aux relations individuelles de travail, au risque de figer une jurisprudence contestée. On tend à valoriser le licenciement individuel, au détriment des dispositions sur l’appréciation par le juge du motif économique du licenciement ou sur le plan de sauvegarde de l’emploi. C’est une évolution conforme au discours patronal qui milite pour écarter le juge des affaires de l’entreprise. Et dans la grande distribution, le réglement intérieur, la convention collective, sont-ils compatibles avec le code du travail ?


La réponse est aussi dans les mobilisations du 1er février et du 28 mars, mobilisations qui sont un signe conséquent d’un ras-lebol généralisé. Autre sujet de grande préoccupation par les syndicalistes cégétistes, la discrimination entre hommes et femmes. La CGT et CFDT ont demandé la nomination d'un expert et ils souhaitent "du temps" pour aboutir à un éventuel accord de branche sur la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences). La lutte dans la grande distribution a fait évoluer les propositions salariales, celles-ci, sont encore bien en dessous des attentes et ne répondent pas aux besoins. Alors que les profits du CAC 40 ont progressé globalement de + de 15 % en 2006, de + de 58 % chez Carrefour, + de 30 % chez LVMH. L’exaspération de ne plus pouvoir vivre dignement de son travail avec un salaire décent atteint son paroxysme.


Syndiquez-vous !”


Syndiquez-vous !” La CGT Commerce, Distribution et la CGT du Pas-de-Calais lancent une grande campagne de sensibilisation pour les revendications fondamentales, campagne relayée dans tous les secteurs géographiques, de Boulogne-sur-Mer à Béthune et de Calais à Noyelles-Godault. Des adhésions ont, déjà, été réalisées et de nouveaux rendez-vous sont à signaler pour continuer le travail entrepris. À Hénin-Beaumont, l’aggrandissement de la zone commerciale (IKEA puis bientôt Lapeyre) est mis à profit par les syndicalistes pour rencontrer les personnels d’Auchan et des magasins de cette grande zone commerciale. La zone commerciale de Noyelles- Godault, l’une des plus importantes au nord de Paris, est un lieu incontournable du passage des militants cégétistes. Et la CGT du Pas-de-Calais, de souligner : “comment rendre la CGT plus forte ? Le secteur du commerce couvre 70 branches professionnelles et 110 conventions collectives. Le patronat de ce secteur cherche à liquider les garanties collectives, à l'exemple de la dénonciation de la convention collective des grands magasins. A ces revendications s'ajoutent celles d'un emploi stable, à temps plein, et d'un salaire convenable en rapport avec la qualification des travailleurs. Comment pointer, par exemple, la responsabilité des donneurs d'ordres qui ont recours à la sous-traitance, comme dans la prévention sécurité? Symbole de cette solidarité syndicale et interprofessionnelle, les motions de soutien aux personnels de Kiabi ainsi qu'à ceux des McDo.” Auchan est un groupe mondial avec, notamment, 120 magasins en France, cinq directions opérationnelles, une Banque, (la banque Accord), un secteur immobilier important avec Immochan.


Auchan, Ikéa… et 70 commerces


A chaque fois que l’on distribue un tract , dit la CGT du Pas-de- Calais, la direction répond aussitôt, coup pour coup. Et elle va discuter directement avec les personnes contactées par la CGT. Aussi, pour faire passer le message, il ne nous reste plus que le contact direct avec les salariés aux abords des magasins et ce dès les premières heures. À Auchan Noyelle-Godault, par exemple, il faut y être pratiquement, très tôt, tellement la flexibilité touche un grand nombre de secteurs et les personnels qui en dépendent.” Quant aux formations, une notion très importante dans la grande distribution, les commentaires critiques sur les contenus de ces formations ne manquent pas.


Une conquête de 68 !


C'est une évidence, il s’agit de stage bidons, dit un salarié ; pourtant je crois que ces fameux stages entrent dans le cadre d'un plan de formation et que toute formation doit se solder pour le salarié par une remise d'attestation de fin de stage. Si on relève le nombre de stages imposés par Auchan à ses salariés, on peut conclure que les employés du groupe sont qualifiés.” Un salarié syndiqué “isolé” doit pouvoir recevoir et diffuser les informations syndicales sur les lieux de travail ; c’est une conquête de mai 68. Cela concerne, aussi, tous les personnels de la Grande distribution et du commerce.


40 000 emplois vont disparaître d’ici 2015


LES grandes surfaces en France risquent de perdre près de 40.000 emplois d'ici 2015, soit 6,3 % de leurs effectifs, ou au contraire d'en gagner 36.000, voire 86.000, selon une étude commandée par le patronat du secteur. Les effectifs passeraient de 636.000 actuellement à 596.000 en 2015. "Des transferts importants de parts de marchés" se feraient "vers le hard-discount".

Les "maxidiscomptes" verraient leurs effectifs progresser de 18.000 emplois, tandis que les grandes surfaces alimentaires traditionnelles (hypermarchés et supermarchés) en perdraient 50.000 et le commerce de gros 7.000. Par métiers, les caissières des grandes surfaces, touchées par la multiplication des nouvelles technologies (caisses automatiques notamment), passeraient de 121.000 en 2005 à 81.000 en 2015 et les employés commerciaux de 209.000 à 198.000.

Selon un scénario moyen, avec la fin du développement massif des points de vente sur le territoire, la grande distribution gagnerait 36.000 emplois. Le nombre de caissières dans les grandes surfaces traditionnelles serait cependant en régression de 6.000 emplois. Après la journée de grève du 1er février pour le pouvoir d'achat et les conditions de travail, les deux syndicats, sur leur faim, ont appelé à de nouvelles actions lors du week-end de Pâques.

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