STORA-ENSO CORBEHEM-DES SALARIÉS CONTESTENT LEUR LICENCIEMENT...

Publié le par Liberté 62




STORA-ENSO CORBEHEM-

DES SALARIÉS CONTESTENT LEUR LICENCIEMENT AUX PRUD’HOMMES D’ARRAS

 

Par Pierre Pirierros

METALEUROP, Sublistatic , Samsonite , Stora-Enso : les salariés contestent leur licenciement et ne s’en laissent pas conter. Ils plaident leur cause devant les conseils de prud’hommes avec une ténacité indéfectible. C’est ainsi que le 21 mai dernier, à Arras, devant cette juridiction de proximité, 63 papetiers de Corbehem ont dit combien leur licenciement en 2006 ne reposait sur aucun fondement. C’était l’arbitraire et la loi du plus fort, pour tous les dommages moraux et matériels encourus, ils demandent 48 mois d’indemnité.

L’aspect judiciaire dans tous ces dossiers recouvre le droit le plus élémentaire des travailleurs à se défendre. Et là, les stratégies de division de la direction vis-à-vis des syndicats, des salariés et des équipes restantes, n’ont plus cours. Les Prud’hommes d’Arras ont écouté les salariés de Stora-Enso ; la Cour d’appel de Douai a, elle, confirmé l’immobilisation des machines 3 et 4 de l’entreprise jusqu’au jugement sur le fond.

Par ailleurs, les “Géants de Papier solidaires” (association regroupant des ouvriers, employés, techniciens, cadres) contestent la décision du tribunal de commerce d’Arras sur la propriété des machines ; audience prévue à Douai le 19 juin. Tout cela souligne l’importance de nouvelles donnes dans un combat décisif contre une multinaltionale qui se sert des salariés comme de simples matricules sur un échiquier mondial. Tout est dans la nuance et la direction se retranche derrrière des arguments de “politique financière” et de “revitalisation du bassin d’emploi”... D’un côté, elle licencie et de l’autre, elle participe à “recréer l’emploi”... Et l’avocat des salariés de préciser que seule la rentabilité compte pour Stora Enso ! Les Prud’hommes d’Arras ont mis l’affaire en délibéré au 17 septembre prochain.

 

Restructuration de grande ampleur

 

Le Nord/Pas-de-Calais, deuxième région papetière française derrière Rhône-Alpes, subit de plein fouet la crise mondiale qui frappe la filière du papier-carton, avec quelque 900 emplois directs à nouveau menacés. L'érosion des effectifs n'est pas récente: alors qu'elle employait entre 13.000 et 14.000 salariés dans la région il y a une quinzaine d'années, la filière, touchée dans toutes ses composantes, n'en compte désormais plus qu'environ 8.000. Octobre 2005, la direction de Stora Enso à Corbehem annonce une restructuration de grande ampleur, avec des centaines de licenciements à la clé. Aujourd’hui, le combat se poursuit sur la scène judiciaire et oppose la direction à l’Association des géants de papier solidaires. Les “Géants de papier solidaires” engagés dans une démarche de production alternative avec des machines de la Papeterie (les “3” et “4”), issue possible à la suite de négociations serrées mais promesse ne veut pas dire acte, voilà un point de vue que Stora Enso défend au tribunal.

Le litige porte donc sur la possibilité de travailler sur ces deux machines ; la direction ne veut pas les céder et préfère les vendre à un groupe étranger. Aujourd’hui, le tribunal de commerce d’Arras a à trancher ce noeud gordien, après une première séance en date du 7 mars dernier, le verdict a été mis en délibéré au vendredi 28 mars prochain... Licenciements, dépôts de bilan, fermetures d’entreprises, rachats, arrêts de machine, tout cela se fait dans un climat délétère ; il va sans dire. Dans le cadre d'un vaste plan européen de restructuration, le géant finlandais du papier avait annoncé en octobre 2005 l'arrêt de deux de ses trois machines à Corbehem et la suppression d'environ 450 emplois (sur 800). Après avoir donné un accord de principe à la reprise de ces deux machines le 8 septembre 2006, Stora était revenu sur sa décision quelques jours plus tard, avant de suspendre les négociations début octobre.

La situation faite aux salariés de Stora Enso à Corbehem est plus qu’inquiétante ; ces derniers engagent solennellement la riposte au patronat et aux pouvoirs publics. “C’est inadmissible et inacceptable de voir tout ce gâchis, social, humain, économique, disent-ils, la direction de la multinationale suédofinlandaise porte l’entière responsabilité de la casse de l’emploi ; mais elle n’est pas la seule, les pouvoirs publics, et en premier lieu, les ministres concernés ont été et sont incapables d’obtenir la moindre réponse sur la production alternative de la part du PDG.”

 

L’emploi, un enjeu déterminant


Et l’on sait pertinemment qu’une activité industrielle amputée est condamnée à terme. La situation de l’emploi est désastreuse dans la région, dans les deux départements, dans l’Arrageois, dans le Douaisis. L’avenir industriel de la région est un enjeu qui concerne toute la population. L’évolution de la situation n’est guère favorable à l’emploi, c’est le moins que l’on puisse dire. Quid de la production alternative à Corbehem? “Stora, soulignent les syndicalistes, doit être un cas d’école pour les cotisants du Medef ; c’est ici que tout a été fait par la multinationale pour éviter un conflit social en pratiquant la division en faisant croire à tout le monde qu’un avenir est encore possible sur le site.”

Stora Enso considère que la crédibilité du projet de reprise des machines n'est pas suffisante et que les risques de cette opération sont trop élevés pour poursuivre les négociations. Qui peut faire pression sur la multinationale ? Il n’y a pas de fatalité à la crise de l’emploi. Qui peut croire un instant qu’un État comme la France ne peut discuter sérieusement avec le PDG d’une multinationale ? C’est un autre débat qui s’instaure, sur les pratiques en cours dans cette Europe libérale, rejetée massivement en mai 2005.

 

Les profits des actionnaires...


Les actionnaires se sont octroyés des profits très confortables ces dernières années. C’est le plan “profits 2007” qui sert de référence aux cadres dirigeants de Stora Enso ; qui dit “profits” dit aussitôt dégraissage et manoeuvres en tous genres pour se débarrasser des postes de travail et investir ailleurs, là où la main d’oeuvre est moins chère. Mais comble du paradoxe, dans un domaine - le papier - où tout se tient, c’est ramener à un coût le plus bas possible pour pouvoir réorganiser les marchés et éventuellement réimporter la marchandise, à forte valeur ajoutée, dans les pays demandeurs. La tactique de la direction est de mettre en concurrence les salariés pour augmenter le profit financier des actionnaires. Comment rendre crédible et justifier un arrêt de machines et des licenciements quand on demande de produire des milliers de tonnes de papier ? Les experts indiquent que le marché du papier va croître d’ici à 2020.

 

Publié dans Social

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article